Si vous avez jamais éprouvé la (vraie) joie, vous savez ce qu’elle rend possible: le coeur se dilate.
Les pores de la joie
Cherchez, pas loin. Un concours réussi, un travail trouvé (surtout le premier), la surprise de l’amour qui dit oui, l’annonce de l’enfant attendu qui vient… En ces occasions, dit-on, le cœur littéralement se dilate. Il respire, devient ample, grand. Et il accueille du monde en lui : ceux à qui on l’annonce, ceux avec qui on la fête, etc. A contrario, dans la tristesse, le cœur se contracte, il se contriste. Le monde devient soudain trop petit, notre cœur aussi : il ne s’y trouve guère d’espace à ouvrir à qui que ce soit et, souvent, nous voulons être seuls.
La joie donc, la véritable joie dilate le cœur, le rend plus grand, l’ouvre à tous les vents et à tous les hommes.
“Dès que la joie se lève, tout s’élargit. Notre respiration se fait plus ample… Nous voudrions sauter, bondir, courir, danser, car nous sommes plus vifs dans un plus vaste espace”.
Jean-Louis Chrétien, La joie spacieuse
En Jésus, le Cœur de Dieu est devenu tellement grand, large et profond (dit la chanson), sa joie si débordante qu’il s’ouvre à toute l’humanité. Chacun, en lui, peut trouver demeure.
Le coeur ouvert par la Croix
Il ne faut pourtant pas oublier que cette dilatation se produit, que ce Cœur s’ouvre en faveur des hommes, un vendredi saint, par une lance transperçant Son côté. Et le miracle, c’est que cette souffrance ne contrista pas son cœur, comme elle l’aurait fait chez tous les hommes. Au contraire elle le dilata pour les raccueillir de nouveau.
Lorsqu’il y a des blessures qui nous atteignent le cœur, en général, il se resserre “pour que ça ne se répète plus”. Il y en a même qui deviennent méchants, trouvant prétexte, à leur tour, de faire souffrir les autres. La Croix, nos blessures… montrent une chose : avoir le cœur dilaté, ça peut faire mal.
Cela eut des conséquences pour le Christ. Mais Lui, le premier, refusa de fermer son cœur à cause de la blessure que Lui infligèrent les hommes. Il décida de le garder toujours grand ouvert, donc toujours vulnérable, mais toujours aimant et ouvert pour la joie des hommes.
Quel sacré coeur!
Mais cela est vrai aussi des hommes : de celui qui traverse la vie, en essayant de garder la joie, malgré ces coups qui n’épargnent personne… de ces personnes, nous disons qu’ils ont grand cœur. Dilaté. Et on pourrait dire aussi, sans blasphème, qu’ils ont un sacré cœur.
D’où Marie dont un cantique dit : “Celui que l’univers ne peut contenir demeure en toi” puisque, dit la litanie, elle est la cause de notre joie. D’où la prière des saints eux-mêmes:
Étroite est la maison de mon âme pour que tu viennes y loger : qu’elle se dilate grâce à toi !
Saint Augustin, Confessions I,5,6