– Mc 13,34

À côté de l’attente, l’absence est l’autre grand thème de l’avent. Et, à l’évidence, notre attente est attente d’un absent. L’évangile que l’on lit en début d’avent dans la version de Marc (oui, oui, j’aime bien Marc) annonce ainsi, sans autre forme de procès : C’est comme un homme parti en voyage… (Mc 13,34). Bon voilà, la messe est dite : on ne pourra plus faire semblant de ne pas savoir que Dieu est… absent.

Mais qui avouera n’avoir pas mal à cette idée? Qui avouera ne lui avoir jamais demandé où il est? Où es-tu? Voilà sans doute la plus répandue des prières, y compris, chez les non-croyants, sous la forme du reproche : Où est-il votre Dieu? (Ps 41/78/113b) Oui, où est-il pendant que ça souffre, que ça guerroie et que des enfants meurent, que les impies prospèrent? Eh bien, même si l’évangile dit qu’il est toujours présent, il dit aussi qu’il est absent et nous a laissé la maison. Cela ne rassure personne, mais cela veut dire une chose ou deux.

D’une part, il est juste et bon que Dieu ne soit pas présent tout le temps. Un prêtre, confortablement installé dans les toilettes d’un restaurant, fut surpris de voir, collée derrière la porte qu’il venait de refermer, une affiche disant : Dieu te voit. Il réussit à garder le calme que lui réclamait l’office sacré des lieux. Mais, à la sortie, il alla droit dire au patron qu’à son avis, Dieu avait des choses plus utiles à faire que de se cacher dans les toilettes pour épier ses clients. Avouez que Dieu serait malpoli d’être là tout le temps avec ses yeux et ses oreilles partout, et qu’ainsi, il deviendrait très vite insupportable. Heureusement que non. Car Il est le Dieu qui laisse de l’espace à l’homme. Littéralement, Il n’était pas là quand Adam et Ève mordent au Serpent au point qu’à son retour, il doit s’enquérir des nouvelles : Adam, où es tu, qu’as-tu fait, etc.? Si parfois une eucharistie, une guérison, une prière exaucée nous font sentir sa présence, son absence est donc aussi une dimension à assumer : même Jésus l’éprouvera sur la croix.

La présence de Dieu nourrit la foi. Son absence l’éprouve, comme un feu et la maintient vive. Car, d’autre part, cette absence est une forme d’absence particulière. Elle conditionne la foi : le jour où il sera entièrement présent, nous n’aurons plus besoin de foi, Paul dixit (1Co 13). On n’attend un train, disait l’autre, que lorsqu’on sait qu’il arrive. Sinon, on n’attend pas. L’absence qui maintient la foi vive n’est donc pas l’absence de quelqu’un qu’on n’a jamais vu et dont on ignore tout, mais celle de celui qu’on a vu partir. Parce qu’on l’a déjà vu œuvrer admirablement, on attend avec joie qu’il revienne. C’est donc une absence remplie de présence, quoique paradoxale. Une absence remplie de la mémoire et de l’imitation de ses œuvres afin de hâter son retour.

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